lundi 25 mai 2015

EXPERIENCE PEDAGOGIQUE

Le débat sur le collège prend de plus en plus la forme d'un affrontement entre les anciens et les modernes. Collège unique pour les modernes qui tentent de l'améliorer, retour aux systèmes anciens pour les autres.
La proposition de Najat VALLAUD-BELKACEM me rappelle une expérience fort ancienne que j'ai vécue en tant qu'élève il y a bientôt 70 ans en 1947. A cette époque Lycées et Collèges Modernes formaient les élèves de la 6° à la terminale.
Le Lycée était considéré comme la voie royale avec séries littéraires (classique A, B, C) et série scientifique (M) plutôt parent pauvre dans ces établissements. Ceux qui mettent leurs enfants en classe bilangue les auraient certainement mis à cette époque en classique.
Pourtant en 6° , dès 1947 dans certains Collèges Modernes (ce fût le cas à Bordeaux rue du Commandant Arnould) une expérience de classe dite "Nouvelle" a été tentée.
Pour faire simple de quoi s'agissait-il ?
-24 élèves par classe répartis en quatre équipes, chacune avec un nom et une devise (ex: Les Lynx, devise: Voir clair; ça ce discute!)
-Il y avait bien sûr des travaux individuels avec notes et classements comme partout à cette époque, mais les travaux d'équipe donnaient lieu à l'établissement de dossiers sur des sujets variés et qui devaient être présentés oralement depuis le bureau du professeur face aux élèves disposés en hémicycle.
-Chaque semaine, le mardi si je me souviens bien, une séance "d'étude du milieu" consistait en une sortie accompagnée d'un professeur (histoire, géographie, sciences naturelles, français) pour visiter un musée, un monument, une industrie (journal Sud-Ouest par exemple) ou aller ramasser des feuilles, des champignons ou encore s'initier à la géologie en se rendant au pied des falaises de la rive droite de la Garonne. 24 élèves dans le tram, accompagnés d'un seul professeur , à cette époque ne posaient pas de problème. Au retour de chaque sortie nous remplissions des fiches parfois en utilisant des mots latins (tient, tient, pour des modernes!). On savait ainsi qu'en latin le chêne s'appelait quercus et qu'il avait donné son nom au Quercy par exemple.
- De plus nous tenions un "cahier de jour" ou chaque soir théoriquement (nous prenions souvent du retard) nous devions rédiger un article traitant de notre activité journalière. Ce serait aujourd'hui un blog.
-Autre particularité, deux séances de sport par semaine, éducation physique à la Maison Communale (attenante à la piscine Judaïque) et séance de plein air au stade Stéhelin. Nous nous y rendions directement, le retour était encadré par les professeurs.
En 5° bien des choses disparaissaient, faute de moyens je pense, mais cette série gardait sa particularité notamment en ce qui concerne le nombre d'élèves. Dès la  4° commençaient une fois par semaine les travaux manuels: travail du bois, du fer, montages électriques, reliure, linogravure, pyrogravure, eau forte, peinture sur porcelaine et je dois en oublier.
Le problème de l'apprentissage des langues n'était pas abordé, traditionnellement une langue en 6°, une deuxième langue en 5°, mais dès la 6°il y avait des échanges entre Bordeaux et Bristol, malheureusement réservés à ceux dont les familles en avaient les moyens.
Il me plait maintenant de trouver des traces de cette manière d'enseigner dans la nouvelle loi, car j'ai toujours apprécié d'avoir vécu cette expérience bien que je ne m'y sois jamais distingué.
Actuellement le débat sur les langues se fait essentiellement sur la durée d'enseignement et sur l'âge de l'apprentissage. Ce deuxième point me parait très important tant la réceptivité est grande dès le plus jeune âge. Mais il me semble que les méthodes d'enseignement seraient plus à mettre en cause que la durée des apprentissages. J'ai toujours été surpris plus tard au cours de ma vie professionnelle de voir que des ingénieurs étrangers, que j'ai eu l'occasion de recevoir, se débrouillaient très bien en français après un stage de six semaines dans un institut à Royan alors que leur cerveau n'avait plus la malléabilité qu'il avait dans leur jeunesse.
Dernier point, à la fin du secondaire, dès cette époque les emplois scientifiques étaient déjà les plus recherchés et les étudiants ayant suivi la filière moderne, même éventuellement avec un second bac philo ( car le bac comportait deux épreuves étalées sur deux ans) menaient plus facilement des études supérieures scientifiques que ceux qui avaient emprunté la classique voie royale, sauf ceux, et ils étaient peu nombreux qui avaient ajouté à leurs études l'option mathématique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire